« Crise sanitaire de 2020 et ses suites : que nous apprennent les données de la DEPP ? »

Activités hors temps scolaire, Évaluations nationales

Synthèse de la DEPP, n° 5, Juin 2022

Résumé :

Ce document présente les résultats des dispositifs statistiques mis en place par la DEPP pour évaluer les effets de la crise sanitaire de 2020 sur le système éducatif français. On trouve d’abord des informations sur la période de confinement de mars à mai 2020 pendant laquelle les classes ont été fermées. Cette première partie se base sur des témoignages de familles, d’élèves et de personnels de l’Education nationale pour rendre compte des conditions d’enseignement et d’apprentissage à distance, des relations avec les élèves et leurs familles, des outils et ressources pédagogiques utilisées mais également des difficultés rencontrées et des impacts du confinement en termes d’inégalités sociales. Une seconde partie du document aborde le retour en classe et les effets sur les acquis des élèves à la rentrée de 2020 et celle de 2021. Il présente les résultats des évaluations nationales en CP, CE1 et sixième pour mesurer les évolutions des performances des élèves en français et en mathématiques par rapport aux années précédentes. Enfin, ce document expose les effets de la crise sanitaire sur l’insertion professionnelle des lycéens et apprentis. A travers le dispositif Inserjeunes, leur situation professionnelle a été étudiée six et douze mois après leur sortie du système éducatif en comparant les cohortes de 2019 et 2020.

Synthèse :

Cette synthèse de la DEPP présente les conditions d’enseignement et d’apprentissage dans le contexte de la crise sanitaire en mettant en perspective les témoignages des différents acteurs du système éducatif, des familles et des élèves. Ce document présente ainsi le vécu de la période de confinement de mars à mai 2020 et les impacts que cette situation exceptionnelle a eu sur les parcours scolaires et l’insertion professionnelle des élèves et des apprentis. L’analyse s’est attachée à comprendre les enjeux en termes d’inégalités sociales en documentant les écarts observés au regard des situations sociodémographiques des élèves et de leur contexte de scolarisation.

D’abord, la synthèse donne à voir la façon dont la fermeture des classes de mars à mai 2020 a impacté l’ensemble des acteurs du système éducatif. La mise en œuvre de la continuité pédagogique pendant le confinement a été globalement appréciée par les parents et les enseignants. Quel que soit le secteur d’enseignement, les parents considèrent majoritairement que l’enseignement à distance a permis à leur enfant de progresser dans ses apprentissages, mais aussi d’acquérir davantage d’autonomie et de mieux maîtriser les outils numériques. Ils estiment également que la quantité de travail était adaptée et que les professeurs apportaient un soutien suffisant. Les principales difficultés rencontrées par les élèves selon leurs parents sont le manque d’autonomie et de motivation, de façon moins prononcée en éducation prioritaire. Les élèves ont également été interrogés sur leur ressenti à l’égard du confinement lors de la passation des évaluations nationales en septembre 2020. On constate que les filles ont moins bien vécu le confinement que les garçons et que la peur du coronavirus a touché davantage les élèves les plus jeunes, les filles et les élèves scolarisés en éducation prioritaire (EP). Ces derniers ont également déclaré avoir eu davantage de difficultés à travailler à domicile que les élèves scolarisés hors éducation prioritaire (hors EP). Plus globalement, le confinement a été vécu plus difficilement par les familles dont les enfants sont scolarisés en EP en termes d’effets psychologiques et de conditions matérielles, mais pas en ce qui concerne les relations avec l’école.

Les directeurs d’école et les inspecteurs du premier degré ont eu un jugement globalement positif sur la gestion de la continuité pédagogique pendant le confinement au printemps 2020 (les seconds davantage que les premiers). Ils ont également considéré que la communication entre les différents acteurs de l’Education nationale était plutôt satisfaisante pendant cette période. Six directeurs d’école sur dix ont travaillé au sein de leur école pendant la fermeture des classes ; un tiers des directeurs a accueilli des enfants des personnels indispensables à la gestion de la crise sanitaire. La majorité des directeurs indique avoir fait preuve d’une plus grande autonomie et avoir pris davantage d’initiatives qu’en temps ordinaire.

Au sein des collèges, pour les personnels de direction et les CPE, la priorité était de préserver le lien d’apprentissage. Selon eux, la communication avec les élèves a été très importante : plus de 90% des élèves ont été suivis. Ils déclarent que les élèves ont rencontré des difficultés à travailler pendant le confinement : l’organisation du temps de travail, la gestion en autonomie, le manque de motivation et le manque de compétences numériques constituent les principales difficultés selon eux. Les personnels de direction et les CPE expliquent également que le manque de soutien et d’appui scolaire à la maison a constitué un obstacle à l’enseignement à distance, de manière plus prononcée en EP. Les difficultés matérielles (débit internet insuffisant, équipement informatique obsolète…) sont également plus évoquées en EP que hors EP. Les personnels de direction et les CPE considèrent que la mise en œuvre de la continuité pédagogique a eu un impact positif sur les compétences numériques des élèves, sur la collaboration entre camarades et sur le développement de leur autonomie. Cependant, ils sont 86% à estimer que cette situation d’enseignement à distance a eu une incidence négative sur la réduction des inégalités entre élèves. Selon eux, « l’école à distance » a également eu un impact positif sur les compétences numériques des enseignants, l’innovation pédagogique et la cohésion d’équipe, mais aussi sur la relation entre les enseignants et les élèves, le lien avec les familles et la reconnaissance des métiers de l’enseignement.

Le ressenti des enseignants à propos du confinement du printemps 2020 a fait l’objet d’un dossier intitulé « Continuité pédagogique de mars à mai 2020 : résultats de l’enquête auprès des enseignants du second degré » publié en novembre 2021. Il montre que les enseignants portent un jugement globalement positif sur la gestion de la continuité pédagogique pendant cette période : ils ont maintenu un lien avec les familles et les élèves lorsque les écoles étaient fermées et ont assuré pour la plupart les conseils de classe et les réunions d’équipe à distance. Ils sont une majorité à avoir disposé d’équipements numériques et de ressources pédagogiques pendant le confinement mais la mauvaise qualité de leur matériel ou de leur connexion internet constituaient pour certains un frein à la mise en œuvre normale de la continuité pédagogique. Leurs élèves étaient également concernés par ces problématiques matérielles, difficultés auxquelles s’ajoutaient un manque de compétences numériques.

Dans un second temps, la synthèse de la DEPP présente les effets du confinement sur les acquis des élèves aux rentrées 2020 et 2021. Les évaluations nationales passées par les élèves de CP, CE1, sixième et seconde constituent une source précieuse de données pour mesurer l’évolution de leurs performances en français et en mathématiques depuis 2018. Une première évaluation en septembre 2020 montre qu’en début de CP, on observe une légère baisse des élèves ayant une maîtrise satisfaisante quel que soit le domaine évalué par rapport à septembre 2019. Globalement, les baisses les plus conséquentes en français et en mathématiques correspondent aux compétences travaillées en fin de grande section de maternelle (période pendant laquelle a eu lieu le confinement pour ces élèves). En début de CE1, la baisse est plus marquée en français qu’en mathématiques, particulièrement en lecture et en écriture. Cette baisse de la part d’élèves ayant un niveau satisfaisant entre 2019 et 2020 s’accompagne en CP comme en CE1 d’une augmentation des écarts de performance entre les élèves scolarisés en EP et hors EP. Cela contraste avec la stabilisation des inégalités observée en 2019 en CP et leur diminution en 2019 en CE1. Concernant les élèves scolarisés en sixième, on constate une amélioration des résultats en français comme en mathématiques par rapport à 2019, bien que ces évolutions soient variables selon le profil social des collèges.

Une seconde évaluation a été passée auprès des élèves en janvier 2021. Après avoir noté la baisse des performances des élèves à la rentrée 2020, ces résultats étaient attendus pour mesurer l’effet de la mobilisation de l’école sur les acquis des élèves pendant les premiers mois de l’année scolaire. Contrairement à ce qui avait été observé entre le début de CP en 2020 par rapport au début de CP en 2019, on ne constate pas de baisse des résultats entre mi-CP 2020 et mi-CP 2021 : les résultats s’améliorent en mathématiques quel que soit le secteur. En français, les résultats progressent également pour les élèves scolarisés hors EP, dans le privé et en REP. Toutefois, par rapport à 2020, les écarts de performance se creusent entre le secteur public hors EP et l’EP, particulièrement en français (ces écarts étant déjà visibles en début de CP en 2020). Les inégalités entre les élèves hors EP et en EP diminuent tout de même entre le début et le milieu de l’année de CP, sans retrouver les écarts de mi-CP 2020 en raison de l’augmentation des écarts observée en début de CP en 2020 par rapport à 2019.

Enfin, une troisième évaluation a été passée à l’entrée en CP et CE1 en septembre 2021 et a permis une nouvelle comparaison avec les résultats de septembre 2019 et 2020. On constate une augmentation des élèves ayant une maîtrise satisfaisante par rapport à 2020 quel que soit le domaine évalué. Les résultats des élèves reviennent au niveau de 2019, voire le dépassent. Entre 2020 et 2021, ces dynamiques s’accompagnent également d’une baisse des inégalités de performance entre les élèves scolarisés en EP et ceux hors EP, notamment en CE1, contrairement à la hausse observée en 2020.

Pour finir, l’impact de la crise sanitaire sur l’insertion professionnelle des lycéens et apprentis a été étudié à travers le dispositif Inserjeunes. Dans le contexte de la crise sanitaire, le taux d’emploi après 6 mois de sortie d’études diminue de 5 points par rapport à la génération sortie en 2019. L’entrée dans la vie active est plus difficile dans les secteurs les plus touchés par la crise sanitaire (hôtellerie, restauration, tourisme…). Un an après leur sortie d’études, on constate que l’insertion professionnelle des apprentis et lycéens professionnels de niveau CAP à BTS s’est améliorée par rapport à leur situation en janvier 2021 : le taux d’emploi a en effet augmenté de 8 points pour les apprentis et 13 points pour les lycéens professionnels. Enfin, pour les lycéens sortant d’études en 2020, l’insertion professionnelle à 12 mois se rapproche du niveau de la génération de 2018 non touchée par la crise sanitaire.

URL :

https://www.education.gouv.fr/media/115552/download

Mots-clés :

confinement, crise sanitaire, évaluations nationales, Repères, CP, CE1, DEPP

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